Quand on est jeune et qu’on souhaite lancer sa propre activité, très vite on est identifié comme un start-upper, il y a comme une équation secrète dans la tête des gens qui donne jeune + entrepreneuriat = start-up.
Le mot start-up est dans la bouche de tout le monde et le concept qu’il véhicule d’entrepreneuriat « cool » « dynamique » et donc « génial », sous-entend que les moyens qu’il nécessite sont également géniaux. Pourtant, passer ses nuits au bureau, ses soirées à répondre aux mails sur son smartphone, pitcher son projet dans tous les concours de la place, séduire les investisseurs et enchainer les hackatons, parfois au prix de sa santé, ne sont pas des fonctionnements qui conviennent à tout le monde.
L’entrepreneuriat est très souvent uniquement conçu à travers le prisme central de la performance. Comme le souligne cet article des Echos[1], il y a 39 260 livres sur Amazon pour apprendre à travailler mieux et plus vite et Apple recense 3 500 applications pour booster sa performance.
Toujours plus vite, toujours plus.
Pourtant, je ne partage pas ce point de vue, puisque la start-up est UNE façon d’entrevoir l’entrepreneuriat, et qui est notamment basée sur une croissance très rapide, souvent grâce à des investisseurs.
Le développement du concept de start-up a tellement été fulgurant dans les médias qu’on en vient à penser que c’est la seule façon d’entreprendre !
Dans ce même article, Rahaf Harfoush, spécialiste du conflit entre productivité et créativité ajoute, « Nous avons cessé de nous concentrer sur le travail pour devenir obsédés par le fait de travailler ».
Du coup c’est vrai que parfois lancer son propre projet laisse supposer que c’est forcément « plus de travail », « plus de performance » et donc « plus de stress », qu’être salariée. Alors, comment on fait face à cette vision des choses (qui fait peur !) ? Et, est-ce que autre chose est possible ?
Le concept de « santé mentale »
Au Québec, j’ai découvert le concept de « santé mentale ».
En France, quand on entend “santé mentale”, on a tendance à penser à “problème” ou “pathologie”, alors qu’au Québec le sujet est abordé justement très en amont pour éviter les aspects négatifs.
Plus généralement, la définition de la santé selon l’OMS est :
“un état de complet bien-être physique, mental et social, et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité. »
(OMS, 2018)
Il s’agit ainsi d’être actrice de sa santé mentale, comme composante importante de sa santé globale.
Bien sûr, c’est un sujet dont on a beaucoup parlé en cette période de confinement et de situation sanitaire et ce qui est important de comprendre c’est que la santé mentale est un sujet qui touche absolument tout le monde et que chacun doit être responsable de prendre soin de cet aspect de sa santé.
Alors concrètement, comment est-ce qu’on prend soin de sa santé mentale, quand on lance sa propre activité ?
Le bien-être mental et les façonneuses de projets
Lorsqu’on lance son activité, on est très impliquée, c’est un peu son projet à soi et rien qu’à soi (« son bébé » comme on dit parfois) et on est souvent prête à tout pour qu’il se développe bien et que ça marche. Alors comment faire pour que :
1 – ça ne soit pas au prix de notre santé
2 – que justement, l’activité qu’on créé soit garante de notre pleine santé (physique, mentale et sociale) ?
Je dirais qu’il y a (au moins) 7 points à maîtriser (et la maîtrise s’acquiert avec la pratique !). Alors, regardons ça de plus près.
Prendre soin de soi : devenir une experte de sa propre santé
Ça peut paraitre logique, mais c’est vraiment le moment de sentir le poids de ces mots, leur valeur profonde : « Prendre soin de soi », comme on prendrait soin d’un enfant, qu’on chérit, qu’on protège, qu’on câline les jours où ça ne va pas trop, qu’on félicite quand c’est le moment et avec qui on est compréhensive. Ça c’est l’état d’esprit à avoir pour pouvoir effectivement pouvoir prendre soin de soi.
L’idée ici c’est faire preuve d’auto-bienveillance. Ça n’est pas toujours facile, car on nous a plus appris à nous dépasser qu’à être bienveillantes envers nous-même. Regardons un exemple.
Je pense à la conférence TED de Joey Walters, qui commence son discours en disant qu’une partie d’elle-même est terrée au fond d’elle, terrorisée par le fait de parler devant autant de personnes, et que c’est le fait d’ouvrir les yeux sur cette partie d’elle-même et de la prendre dans ses bras, qui fait qu’aujourd’hui elle est capable de faire une conférence devant tout un parterre de spectateurs. Cet exemple montre comment faire preuve d’auto-bienveillance envers sa vulnérabilité.
Il est donc important d’évoluer (même petit à petit) vers un état d’esprit du « prendre soin de soi », « d’auto-bienveillance ».
Mais, au-delà de l’état d’esprit, comment on fait concrètement ?
Je dirais que quand on arrive à avoir cet état d’esprit, on a déjà fait les 80% du chemin, car on devient alors capable de s’écouter et donc de répondre à ses attentes.
Attention, bien sûr que s’écouter dans le sens « prendre soin de soi » n’est pas s’écouter dans le sens « faire tout (ou uniquement) ce dont on a envie ». Il y a une mesure à avoir, qui n’est pas toujours facile à équilibrer d’ailleurs mais qui est sensiblement la même différence entre « j’ai faim donc je vais manger » et « oh un muffin ! donc je vais le manger ».
Clairement il faut faire preuve de discernement. Mais je te fais confiance sur ce point.
Alors concrètement, voici 7 conseils pour arriver concrètement à prendre soin de toi, tout en développant ton activité.
#1 Te considérer comme une sportive de haut niveau
Quand tu développes ton propre projet, tu es à la fois l’experte (sur le cœur de ton activité), le service administratif, communication, mais aussi marketing (grand mot simplement pour dire « se faire connaître »), etc. Donc, si tu ne vas pas bien et bien tout s’écroule et tous les « services » de ton entreprise sont mis en pause ou tournent au ralenti.
C’est d’autant plus vrais chez les femmes, qui sont assez souvent multitâches (faire plusieurs choses en parallèle) et multi-potentielles et qui ont tendance à faire vraiment BEAUCOUP de choses sur une journée, sans parler de la charge mentale, qui va souvent avec.
La bonne santé de ton corps est une condition pour que tu puisses mener à bien tes projets, donc tu as tout intérêt à être vraiment à l’écoute de ce qu’il cherche à te faire comprendre. En fait, c’est exactement comme les sportifs de haut niveau : si leur corps ne va pas bien (mental ou physique) et bien ils ont bien moins de chance de faire carrière dans ce milieu, donc ils en prennent grand soin.
Donc considère-toi (réellement) comme une sportive de haut niveau !
Prendre soin de ton corps c’est l’unique moyen de développer le projet qui te tient à cœur sur le long terme, donc soigne-le, quitte à aller un peu moins vite ou faire différemment. Par exemple, si tu es trop fatiguée pour certaines tâches ce matin, pourquoi ne pas réorganiser la semaine en faisant aujourd’hui des tâches moins complexes ?
Pense aussi à avoir un mode de vie sain, qui aille dans le sens d’aider ton corps : boire 1,5 litre d’eau chaque jour (et pas avec du thé, du café ou des tisanes dedans). Manger équilibré, avoir un équilibre pro/perso qui te convienne, etc.
#2 Accepter puis assumer sa vulnérabilité
Comme dit plus haut, quand on entreprend on fait plein de choses différentes ! Et, comme toutes les autres personnes (grande nouvelle !) : nous ne sommes pas parfaites ! et non mesdames ! alors autant l’accepter et l’assumer tout de suite : ce qui est fortement salvateur pour nos santés mentales.
Par exemple, en mai dernier, alors que la France se déconfinait (et pas le Québec, là où j’habite) et bien mon corps m’a fait comprendre qu’entre tous les projets que j’avais en tête d’un côté et les moyens que j’avais pour les mettre en œuvre à cet instant t (c’est-à-dire mon corps lui-même) et bien ça n’aller pas marcher. J’ai donc décidé de l’assumer pleinement et d’arrêter les emails que j’envoie chaque semaine à mes lectrices pendant 3 semaines, laissant de la place pour mettre en place ce que je souhaitais (de nouveaux articles et des interviews, dont celui-ci). Si je n’avais pas accepté cela, j’aurais continué, au prix de ma santé et je serais donc devenue encore plus vulnérable.
Ainsi pour être en pleine santé mentale, il faut parfois se défaire de certaines choses pour laisser la place à d’autres. Et c’est OK comme ça !
Personne n’est un super héros, et je dirais même c’est rassurant ! 🙂
#3 Savoir demander de l’aide, s’entourer
Lancer son activité (qui plus est, alignée avec ses valeurs) est une sacrée aventure ! Mais comme toute aventure ou voyage, il y a des hauts et des bas et être seule dans ses remous, surtout quand on est une jeune aventurière (dans le sens, nouvelle à l’aventure : on peut avoir 65 ans et n’avoir jamais lancé de projet), n’est pas des plus faciles.
Une des étapes les plus importantes pour ne pas s’épuiser dans son projet est justement de ne pas être seule. Tu peux être seule à porter ton projet et être entourée de plusieurs personnes qui vont t’aider, te soutenir dans cette direction.
C’est le moment d’identifier les amis qui te soutiennent, qui sont positifs vis-à-vis de ton projet, des membres de ta famille, concernant le soutien que tu peux avoir dans la sphère personnelle. Ils sont d’une grande aide !
Mais s’arrêter à avoir du soutien dans la sphère personnelle, ne t’aide pas vraiment sur des aspects techniques, qui peuvent uniquement venir de personne ayant cette expérience. C’est le rôle des mentors et des coachs qui sont cruciaux pour alléger ta charge mentale et pouvoir tendre vers tes objectifs en sachant quel chemin emprunter.
#4 Ne pas se laisser (trop) influencer par le rythme et les résultats des autres
Quand on développe sa propre activité, souvent on s’inspire d’autres, on rencontre d’autres porteurs de projets (en ligne, espace de coworking, etc.) et ça peut être tentant de se comparer aux autres.
Pourtant, comme le dit Michael Freeman de l’Ecole de médecine de l’Université de Californie à San Francisco, spécialiste de la santé mentale des entrepreneurs : « la neurodiversité, c’est ce qui fait de nous des sociétés formidables ». Et oui, nous ne fonctionnons pas tous de la même façon. Littéralement, nous ne sommes pas tous « câblés » de façon identique.
Donc il faut que tu trouves TON rythme, TES objectifs et puis, une fois que tu as élaboré une stratégie (ça peut être utile de se faire accompagner sur ce point, surtout quand on débute) et bien tu t’y tien et que ton voisin fasse deux fois plus d’articles ou travaille de 6h du mat à 23h, ne change rien, c’est son choix et toi tu fonctionne différemment.
#5 Mettre des limites claires
Pour être en pleine santé, il est important d’être au clair sur l’équilibre pro/perso que tu souhaites avoir et donc de t’imposer (surtout quand tu es seule aux manettes) des horaires de travail et d’effectivement ne pas être disponible en dehors de ces horaires. C’est la limite dans le temps.
Ça peut être sain aussi d’avoir des limites dans l’espace et si tu travailles sur ton projet depuis chez toi, d’avoir un coin bureau pro, dédié à ton activité professionnelle.
Ces limites quand elles sont claires à la fois pour toi et tes clients (il faut communiquer dessus, bien entendu), sont saines et garantissent un équilibre pro/perso plus durable.
#6 S’aérer la tête (et le reste)
On ne dira jamais assez ô combien c’est important (et vital en fait) de passer du temps dehors, en nature, dans la forêt de façon vraiment régulière.
Je t’invite ainsi à prévoir dans ta journée et/ou dans ta semaine des moment en extérieur et des moment où tu ne fais « rien », des moments de contemplation. Il faut savoir que quand d’apparence on ne fait rien, le cerveau travaille beaucoup à assimiler et « ranger » tout ce qu’il n’a pas eu le temps de faire. C’est un temps de « recharge » NECESSAIRE à notre bonne santé mentale.
Pour certaines ça va être aller marcher 15 min dehors le matin (sans rien faire d’autre), pour d’autres ça sera se poser à la fenêtre pour regarder les oiseaux à midi, ou faire une longue balade en forêt chaque vendredi soir, c’est à toi de voir ce qui te convient.
#7 Se former aux enjeux de santé mentale
Et puis, pour aller plus loin et mieux comprendre les enjeux de santé mentale notamment liés aux entrepreneures, ça peut être intéressant de se former, pour en savoir plus, trouver de nouvelles idées, comprendre ce qu’il se cache derrière son propre fonctionnement. Il existe de plus en plus de conférences et de formations en ligne ou en présentiel sur des sujets comme l’intelligence émotionnelle, etc.
Performance et performance
Pour conclure, je voudrais revenir sur la notion de performance. En fait je dirais qu’il y a au moins deux types de performances : celle qui est guidée par la peur (peur d’être en retard, de pas arriver à tout faire, de ne pas satisfaire les clients et du coup travailler dur dur dur pour éviter ces menaces) et celle guidée par la joie (envie de satisfaire pleinement ses clients, joie de diffuser un article sur un sujet qui nous tient à cœur, et du coup être bienveillante envers soi-même pour pouvoir maintenir ce niveau de joie qui nourrit pleinement son activité).
Quand tu sens que tes actions pros sont guidées par la peur, tu peux mettre en place une « alarme » (littéralement, tu peux même choisir la sonnerie de ton alarme interne) qui t’indique qu’il faut faire un point pour voir comment faire les choses différemment. Et petit à petit t’organiser pour permettre à ton corps d’être dans un état guidé par la joie.
Finalement on pourrait inventer un nouveau concept, de l’entrepreneur en pleine santé, centré sur ses valeurs écologiques et humaines, bienveillants envers son corps, un style de slow-entrepreneur (tout en étant performant), sur le mode slow-food ou slow-life. Qu’en penses-tu ? En quoi cela t’inspire ?
[1] https://www.lesechos.fr/tech-medias/hightech/ces-nouveaux-troubles-mentaux-qui-frappent-les-entrepreneurs-1019511
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Et pour commencer, si tu souhaites que nous gardions contact, je t’invite à faire la méditation “Ce que mon cœur aime que je fasse”, ci-dessous.